"Voeux", par Serge Guérin

On a beau se croire habitué, voire blindé, on trouve toujours des surprises dans les vœux que formulent les politiques à l’occasion de l’an nouveau. Ainsi, un hasard malicieux m’a fait prendre connaissance des vœux de Marine Le Pen à la presse : elle « refuse le buzz », et souhaite « élever le débat politique ». Là, j’ai frotté mes yeux vifs et éveillés avec une vigueur de nature à provoquer une conjonctivite, puis j’ai relu. C’était bien ça.

Oh ! Que je fus déçu ! Comment une vraie fille de France, qui brame « France d’abord » de façon itérative peut-elle « refuser le buzz » ? Aimer la France, c’est aussi aimer sa langue, et dire, par exemple « refuser le sensationnel gratuit ». Certes, la formule est plus longue, mais pas insurmontable pour Marine et ses talents de tribun (forcément masculin, tribune, c’est autre chose).

Quant à «élever le débat politique»… Quel est le sens de la formule ? Cela consisterait donc à rabâcher, avec un entêtement sénile «Sus, mes preux, boutons l’Arabe hors de France» ? Eh ben, quelle élévation !

Qui, si ce n’est le F.N., a le plus contribué à mener le débat politique dans le caniveau, voire dans l’égout dont il a pris l’odeur? « Et c’est ce fumet-là que vous trouvez plaisant. » (Merci, Jean Ferrat). Salut, les gars de la Narine!

L’aveuglement qui conduit à ne pas voir ces évidences a quelque chose d’émouvant, en plus d’être répugnant. C’est pourtant un aveuglement prévisible, puisque le F.N. est un pays où le borgne est roi. Et ses habitants n’en ont MÊME PAS HONTE.

Serge Guérin