La lettre d'Ariane Ascaride, que Rouge Cerise publie ci-dessous, reflète toute la douleur des travailleurs de la culture et de tous ceux à qui ils apportent tant de plaisir.
Les communistes du Vaucluse sont d'autant plus sensibles à cette détresse qu'elle touche particulièrement notre département où le théâtre et les autres spectacles vivants tiennent une grande place . Ils sont témoin des difficultés matérielles et morales de celles et ceux qui, souvent avec des statuts particulièrement précaires, travaillent dans le domaine de la culture. Ils s'associent pleinement aux revendications de la CGT-spectacle pour les résoudre.
Ce cri de douleur du monde du spectacle est aussi l'occasion de réfléchir sur cet acte 2 de la crise sanitaire.
La population était sans doute prête, pour assurer sa protection à accepter le confinement, malgré sa grande brutalité et les privations et contraintes qu'il entraîne car, comme le disait Fabien Roussel "Ce qui compte c'est la vie d'abord, la santé d'abord.... et si cela passe par un confinement généralisé il faut le faire". Cependant force est de constater qu'aujourd'hui c'est bien autre chose que le gouvernement met en place: il enferme les vieux et supprime loisir et convivialité pour toute la population; seul le travail est autorisé! Et encore dans ce domaine trouve-t-il le moyen de favoriser les grandes sociétés en fermant les petits commerces mais en laissant les grandes surfaces ouvertes, en fermant les petites librairies mais en laissant la FNAC ouverte! En fait c'est un véritable permis d'exploiter à moindres coûts qu'il donne au grand patronat!
Dans ces conditions la protection de la population apparaît comme très aléatoire.
Souffrir quand l'absence de moyens, de cohérence et de rigueur rend le résultat bien improbable? Par sûr que ce soit bien accepté....
À suivre .....
Tribune libre (*) d' Enver
(*) Une tribune libre est publiée sous la responsabilité de son auteur et n'engage ni la section Oswald Calvetti, ni le PCF.
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Source: France Inter
Monsieur le Président
Je sais. Vous êtes au four et au moulin et ma lettre ne pèse pas bien lourd face à cette marée épidémique. Mais je ne peux pas m’empêcher de l’écrire.
Monsieur le Président, hier soir devant ma télé je vous écoutais avec une grande attention, mon espoir bien avant l’allocution était réduit à néant, mais ce qui fait un trou à mon âme est l’absence dans votre discours du mot culture.
Pas une fois il n’a été prononcé, nous sommes la France, Monsieur, pays reconnu par le monde entier et envié par tous pour la présence de sa créativité culturelle, la peinture, la musique, la littérature, la danse l’architecture, le cinéma, le théâtre (vous remarquez : je cite mon outil de travail en dernier), tous ces arts sont dans ce pays des lettres de noblesses que les hommes et les femmes du monde admirent.
C’est un pays où marcher dans les villes raconte l’histoire du monde, où la parole dans les cinémas et les théâtres apaise, réjouit, porte à la réflexion et au rêves ces anonymes qui s’assoient dans le noir pour respirer ensemble un temps donné. Nous sommes indispensables à l’âme humaine, nous aidons à la soigner, je ne parle même pas de tout le travail que nous faisons avec les psychiatres .
Nous sommes des fous, des trublions, mais tous les rois en ont toujours eu besoin.
Et hier soir, silence total...
Je pensais à Mozart hier soir, au fond le regard des dirigeants n’a pas tellement changé et ça me désespère. Nous faisons du bruit, nous parlons et rions fort, nous dérangeons certes, mais sans nous, l’expression de la vie est réduite à néant.
Aujourd’hui je suis perdue. Je sais, je veux le croire, les lieux de cultures ouvriront à nouveau et on pourra retourner dans les librairies acheter un livre que l’on glissera dans la poche de son manteau comme un porte bonheur, un porte vie .
Hier soir, quelque chose s’est brisé dans mon cœur. Je ne sais pas bien quoi. Peut-être l’espérance,
Et c’est terrible pour moi , car c’est l’espérance d’écrire un beau livre, de construire un bel édifice, de faire entendre un texte magnifique, de peindre l’aura des humains, de faire chanter et danser nos spectateurs, qui nous poussent tous à travailler comme des fous, à faire des sacrifices de salaire, des sacrifices familiaux. Demandez à nos familles ce qu’elles acceptent parfois pour que nous puissions donner de la joie à ces anonymes .
Voilà Monsieur le Président, je ne pouvais pas me taire. Moi, votre silence m’a démolie. Mais je me relèverai et mes amis aussi. Je voulais juste que vous mesuriez avec cet oubli combien vous vous avez écorché les rêves de ceux qui font rêver et se sentir vivant.
Avec toutes salutations respectueuses
Ariane Ascaride