(Festival Polar à Sorgues, 2000. Raymond Chabert et Roger Martin)
Le 2 juillet 2022, Raymond Chabert est décédé. Victime d’un AVC deux mois plus tôt, il avait semblé se remettre rapidement, reconnaissant ses visiteurs et recouvrant l’usage de la parole. Hélas !, la maladie l’a rattrapé alors qu’il venait de rentrer chez lui.
Jeudi 7 juillet, malgré une date peu propice, nous étions nombreux, autour de sa famille, Fabienne, sa fille et Frédéric, son fils, et ses petits-enfants, à lui rendre hommage au crématorium d’Orange.
Une cérémonie émouvante, où l’assistance put écouter les interventions de Jean Spinardi pour la Société littéraire de Sorgues, Claudine Martinez pour Études sorguaises, et les témoignages de souvenirs de Frédéric et de Julie, sa petite-fille.
Raymond était communiste. Un communiste fidèle, viscéralement attaché à son parti, contre vents et marées et sans jamais taire ses divergences lorsqu’il y en avait. C’est une figure exceptionnelle et infiniment attachante qu’ont rappelée deux de ses camarades. Roger Martin, qui, bien avant de s’installer dans le Vaucluse, était associé avec lui pour le festival polar Main basse sur la ville (débuté en 1984 !), et Vivian Point, ex-Secrétaire de la Fédération de Vaucluse du PCF et, comme Raymond, militant de la section de Sorgues. Dans la salle où avaient pris place André Castelli, conseiller départemental d’Avignon et Guy Moureau, maire d’Entraigues, bien d’autres, dont la peine était visible, auraient pu aussi évoquer leur Raymond Chabert.
Nombreux sont les communistes de la section Oswald Calvetti qui ont eu la chance de côtoyer ou simplement rencontrer Raymond. On se rappelle d’ailleurs que plusieurs de ses articles, souvent en rapport avec la Résistance, ont paru dans Rouge Cerise.
Nous avons choisi de publier aujourd’hui l’intervention émue et forte qu’a prononcée Vivian Point et l’article publié par La Provence, qui témoigne du rayonnement de celui qui était notre camarade et notre ami.
Rouge Cerise
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Intervention de Vivian Point pour le Parti communiste français
Mon très cher Raymond,
Voilà le moment tant redouté arrivé, celui de te dire au revoir.
Certes l’âge était là et ton état de santé s’était dégradé ces derniers mois, mais nous ne pouvions imaginer le pire.
Apprenant ton retour chez toi, nous avions l’espoir d’une guérison prochaine, mais hélas cela fut impossible.
Je veux en mon nom et en celui de la Section Fernand Marin du Parti Communiste Français vous dire combien nous sommes tristes et assurer à sa famille, ses enfants et petits-enfants, ses amis, toute notre affection.
Nous sommes tristes mais les bons moments passés avec Raymond toutes ces années resteront à jamais gravées dans nos mémoires.
Raymond était un compagnon de route, un compagnon de combat contre les injustices et les inégalités.
Il était tout simplement un ami, un camarade qui a consacré toute sa vie à son idéal, le communisme.
Combien de milliers de tracts distribués, d’affiches collées, de journaux vendus comme la Marseillaise ou l’Humanité ?
Combien de réunions de cellules, de sections, de discussions passionnées ?
Il avait la hantise de voir son parti abandonner son idéal au nom d’une modernité politique absolument nécessaire aux yeux de certains.
Pleinement satisfait des choix de notre dernier congrès et de la candidature de Fabien Roussel aux élections présidentielles, Raymond était peiné de ne pouvoir participer pour la première fois de sa vie à une campagne électorale.
C’était un homme attachant, passionnant et aussi un homme passionné.
Il savait dire les choses avec détermination, franchise, mais aussi avec respect.
Il savait écouter et ses profondes convictions ne l’empêchaient nullement d’être animé d’un esprit de tolérance reconnue.
Parfois, il haussait le ton dans le débat, non pour s’imposer, mais tout simplement pour exprimer la force de ses idées chaque fois qu’il le jugeait nécessaire.
Raymond n’a jamais renoncé à son engagement malgré les bouleversements politiques dans le monde.
Antifasciste, pacifiste et résolument antiraciste, jusqu'à son dernier souffle, il restera fidèle à ses engagements de jeunesse.
Il va manquer à ses camarades de la section Fernand Marin de Sorgues où il était unanimement apprécié.
Il va manquer aussi à toutes celles et ceux qui l’ont côtoyé par le passé à la fédération du PCF.
Au début des années 80, il a apporté ses compétences professionnelles lors de l’achat du Parc des libertés et du nouveau siège de la fédération.
Il avait d’ailleurs accepté de cautionner pour le parti certains prêts bancaires, ce qui lui a occasionné parfois quelques ennuis.
Raymond était également très attaché à sa ville, Sorgues.
Sous la municipalité de Fernand Marin, il a été conseiller municipal puis adjoint à la culture durant plusieurs mandats.
Nul autre que lui ne pouvait assumer cette responsabilité au regard de ses connaissances, de son savoir et de son intérêt pour l’art.
Comment oublier toutes les initiatives qu’il a impulsées autour du polar ce qui a permis à beaucoup d’entre nous d’avoir la chance de rencontrer des auteurs et acteurs formidables.
Comment oublier aussi l’aide technique et juridique qu’il a apportée tout au long de sa vie à des centaines de Sorguais notamment dans le cadre de son mandat de conciliateur de justice.
Comment oublier également son engagement dans le tissu associatif où il a joué un rôle de premier plan, notamment le cas à la MJEP qu’il a présidé de longues années.
Raymond était une figure incontournable de notre ville et la municipalité actuelle a salué à plusieurs reprises son travail et son dévouement.
La grande passion de Raymond, c’était l’histoire.
Celle de Sorgues tout d’abord, ce qui l’a conduit à présider plusieurs associations comme la Société littéraire ou les Études sorguaises.
Grace à lui, à ses recherches et à ses très nombreux articles et ouvrages, nous sommes nombreux à avoir découvert certains événements historiques de notre ville.
Sa bibliothèque, avec de nombreux ouvrages sur l’histoire de son Parti ou sur le mouvement communiste mondial, atteste également de son inlassable travail pour comprendre et analyser telle ou telle période.
Son sujet de prédilection était sans aucun doute la Deuxième Guerre mondiale, tout particulièrement la Résistance Française.
Il était intarissable à ce sujet. Il faut dire qu’il avait de qui tenir avec des parents dont l’épicerie à Sorgues servait de cache d’armes et de marchandises dans les heures sombres de notre pays.
Son savoir, il aimait le faire partager, non par prétention ou vantardise, mais tout simplement parce qu’il souhaitait avant tout que la mémoire perdure.
Nous sommes nombreux à avoir eu en mains un livre ou une copie d’article que Raymond nous prêtait. Gare à celui ou celle qui oubliait de les lui rendre !
Un passeur d’histoire, voilà ce qu’il était, que ce soit dans les livres ou plus récemment sur les réseaux sociaux où ses textes nous ramenaient avec bonheur quelques décennies en arrière.
Raymond, tu as eu une vie bien remplie et tu as toujours fait face y compris dans les moments difficiles.
Je ne t’enverrai plus de SMS pour te rappeler nos réunions de sections.
On ne te croisera plus avec ton Clopinaud dans les rues de Sorgues.
C’est ainsi.
Merci Raymond d’avoir été là,
Merci de nous avoir accordé ton amitié.
Merci pour ton esprit de résistance et tes messages d’espoirs.
Merci pour tout ce que tu as fait pour le Parti Communiste Français.
Raymond, je crois que le plus bel hommage que l’on peut te rendre aujourd’hui, c’est de te dire avec sincérité que tes camarades continueront à se battre contre le fascisme, contre le racisme, pour la paix dans le monde, pour la justice et le partage, la solidarité et la fraternité.
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ARTICLE DE LA PROVENCE