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Les articles de Rouge Cerise sont toujours signés. Exceptionnellement, nous dérogeons à ce principe lorsque l’auteur s’expose à une répression rendue plus redoutable encore par ces temps où le Covid semble pain béni pour les licencieurs, comme nos camarades de la CGT d’Eurenco en font la sinistre expérience. Dans le monde de la Culture, le virus accentue la destruction programmée de secteurs entiers, comme c’est le cas à la radio. Mais tant que Les Grosses Têtes, une émission culturelle célèbre chère à madame Roselyne Bachelot, ne sont pas touchées, a-t-on le droit de se plaindre ?

Rouge Cerise

 

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"Allo, allo, ici radio Paris... Résistance, état de guerre, m'a-t-on dit depuis un an déjà...

Je suis comédien et je travaille pour France Culture, je n'ai plus le droit d'enregistrer, même seul, dans un studio de 50 m2, des textes de philosophie, d'histoire, de sociologie. Je parle en contrebande, sous la couette (pour amortir les sons), je tente de faire passer des textes compliqués et magnifiques, l'ordi sur les genoux, dans cette tente de sudation ; je deviens ingénieur du son, directeur artistique et toute l'équipe technique. Je ne deviens rien : je pallie comme je peux et ils me manquent terriblement, les artisans de la radio.

Bien avant le ou la Covid, la mort était programmée : plus d'artisans coûteux, de documentaires magnifiques : réduisons la radio à des pousse-boutons ou des interviews en tête à tête. Tout le travail de composition, de montage, tout le sel et la saveur de la terre peuvent disparaître au profit de ? Même pas plus d'audience... au contraire.

Donc j'enregistre de loin, j'ai de la chance par rapport à plein de mes potes comédiens qui ne travaillent plus depuis un an.

Ma voix, la distance et la présence.

Pendant ce temps-là, j'entends tous les jours sur France-Inter les émissions qui continuent avec chroniqueurs et invités.  Je les écoute, ils me font rire et parfois penser, mais je ne peux m'empêcher de poser la question triviale, adolescente et éternelle : pourquoi ?

Comme dans un récit de Kafka, l'ordre sanitaire obéissant à des règles arbitraires et mouvantes : Nagui peut travailler, moi pas. Suis-je contagieux ?"

 

[1] On achève bien les chevaux, roman noir d’Horace McCoy publié en 1935. Deux comédiens que la Crise a cassés s’inscrivent à un marathon de danse dans l’espoir de gagner 1000 dollars. Une parabole impitoyable sur la grande Dépression et le capitalisme, portée à l’écran en 1969 par Sydney Pollack, avec Jane Fonda et Michael Sarazin. À lire et à voir ! (Folio Policier).

Tag(s) : #CULTURE, #JE LUTTE DES CLASSES
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