L’héritage de Marcel Paul nous rend plus forts dans la bataille pour la reconstruction d'un grand service public de l’énergie
Voici quarante ans, disparaissait Marcel Paul à l’âge de 82 ans.
L’ancien président de la Fédération Nationale des Déportés et Internés Résistants et Patriotes (FNDIRP) revenait de la cérémonie du 11 novembre 1982 à l’Arc de Triomphe, où il s’était entretenu avec le président de la République François Mitterrand, quand il décédait dans son appartement de Saint-Denis, en début d’après-midi.
Rescapé du camp de concentration de Buchenwald, Marcel Paul se consacrait depuis 1963 à entretenir le souvenir des combattants de la liberté pendant la Seconde Guerre mondiale. Il avait été, à Buchenwald, l’un des principaux artisans du « comité des intérêts français », organisation créée dans ce camp de concentration à l’image du Conseil national de la Résistance, et présidée par le colonel Henri Manhès.
Quand la Deuxième Guerre mondiale éclata, cela faisait déjà plus de quinze ans que Marcel Paul s’était engagé, d’abord à sein de la CGT, puis dans les rangs du Parti communiste.
Enfant de l’assistance publique, Marcel Paul était devenu ouvrier électricien au lendemain de la Première Guerre mondiale, grâce à la formation qu’il avait reçue en s’engageant dans la Marine nationale.
Embauché en 1923 à la Compagnie Parisienne de Distribution de l’Electricité – dont on peut lire le sigle CPDE encore aujourd’hui sur quelques trottoirs parisiens –, Marcel Paul travaillait d’abord à la production d’électricité à la centrale de Saint-Ouen, puis à la distribution dans l’un des arrondissements du centre de Paris.
Le jeune militant s’engagea alors progressivement dans la bataille pour un statut unique des personnels des sociétés électriques de la région parisienne.
En parallèle, il contribua à mettre sur pied, au début des années 1930, un premier réseau d’œuvres sociales pour le personnel des services publiques comprenant un dispensaire, un service juridique et un groupement d’achats en commun.
C’était l’époque où les syndicalistes de la CGTU mettaient en pratique la théorie du syndicalisme à bases multiples qui connaitra son apogée après la victoire électorale du Front populaire (avec la création de colonies de vacances pour les enfants, de centres de formation professionnel pour les chômeurs, de maisons de repos pour les travailleurs convalescents, etc.).
Conseiller municipal de Paris de 1935 à 1938, Marcel Paul défendit à l’Hôtel de Ville la vie quotidienne des habitants des quartiers populaires ou encore les revendications du personnel des services publics.
À la veille de la Seconde Guerre mondiale, il était désigné secrétaire général de la fédération CGT réunifiée de l’éclairage. Il y défendit entre autres la constitution d’un syndicat de cadres affilié à la CGT. Par ailleurs, il s’intéressait de plus en plus aux questions de politiques énergétiques.
Au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, Marcel Paul devint ministre de la Production industrielle. Son nom allait définitivement être attaché à cette grande réalisation directement inspiré du programme du Conseil national de la Résistante : la nationalisation du gaz et du l’électricité et la création d’EDF – GDF.
Considérant l’incapacité du marché du gaz et de l’électricité à satisfaire les besoins de la population, Marcel Paul s’employa à la nationalisation d’un maximum d’entreprises, sans pour autant faire disparaître toutes les compagnies privées.
En parallèle, il accompagna cette nationalisation d’une politique sociale ambitieuse, offrant à l’ensemble des électriciens et des gaziers un statut national du personnel imaginé à partir de tous les statuts existants jusqu’alors.
Pour finir, il avait prévu de donner aux usagers une place au sein du conseil d’administration, mais la Guerre froide eut raison de ce projet.
C’est alors que Marcel Paul redevint secrétaire de la fédération CGT de l’éclairage, après un passage à la tête du Conseil central des œuvres sociales (CCOS).
C’est cet héritage si précieux, garant de l’indépendance de la France et du droit à l’énergie pour tous, qui est aujourd’hui fragilisé par plus de deux décennies de libéralisation européenne accompagnée par les gouvernements français successifs.
Pire, ces politiques nourrissent la grave crise énergétique en France et en Europe en désarmant notre pays face aux mécanismes spéculatifs mondialisés.
Avec la création d’un « marché de l’énergie » et la mise en concurrence des opérateurs publics, avec la loi NOME de 2010 et la création de l’Arenh, avec les projets de démantèlement de notre opérateur public intégré, les gouvernements libéraux s’attaquent pierre par pierre à cet édifice, imaginé, construit sous l’impulsion de Marcel Paul et des travailleurs de l’énergie.
Les communistes de 2022 sont quant à eux fidèles à cet héritage en s’opposant aux logiques capitalistes et en rassemblant les usagers, les travailleurs de l’énergie, les acteurs économiques et les collectivités publiques autour d’un projet : la reconstruction d’un grand service public de l’énergie, de la production à la distribution, adossé à un opérateur public intégré au nom d’EDF, et l’abrogation de la loi NOME et de l’ARENH.
C’est cette voie, initiée par Marcel Paul dans les conditions de son époque, qui permettra aujourd’hui de résoudre la crise énergétique, source de pénuries et de restrictions pour les familles, d’explosion des prix pour les collectivités publiques, des coûts pour les entreprises et de perte de souveraineté pour notre pays.
C’est donc ce combat que le PCF, ses parlementaires, ses élus et militants, vont amplifier dans les prochaines semaines, avec la même détermination que celui qui nous a quittés il y a 40 ans, et à qui nous rendons aujourd’hui hommage, notre camarade Marcel Paul.
Fabien Roussel
Secrétaire national du PCF
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