Empêcher la construction de l'usine à lait
Un article du blog de Parick Le Hyaric
Notre journal (L'Humanité NDLR) s’est plusieurs fois fait l’écho de la mobilisation d’agriculteurs, de citoyens, d’élus de la région d’Abbeville contre la construction d’une étable de mille vaches. La construction de cette « ferme-usine », a malheureusement déjà commencé, avec l’autorisation donnée par le préfet. Mais voici que, grâce à la ténacité du mouvement au moment même où le Parlement débat d’une nouvelle loi agricole promouvant « l’agro-écologie », des ministres font enfin un premier pas en recevant les représentants de l’association de lutte contre ce néfaste projet, Novissen ainsi que la Confédération paysanne. Enfin ! Le ministre de l’environnement les a informé que ce « dossier » était « placé sous son autorité». Mieux, il s’est désolidarisé de la décision préfectorale qui avait autorisé l’ouverture du chantier. Ce faisant le ministre de l’environnement M. Martin a confirmé que « les services de l’Etat ont failli ». Il aurait ainsi fait savoir que « le gouvernement est opposé à ce projet » et qu’il « va agir pour le stopper » en portant l’affaire devant les cours de justice compétentes. Si tel était le cas, cela changerait totalement le rapport de force au service de l’intérêt général.
Voici une preuve nouvelle de la nécessité pour nos concitoyens de prendre en main toutes les affaires qui les concernent. C’est en effet la sensibilisation organisée par l’association Novissen et les mobilisations multiformes qui ont rendu possible ces modifications. Agriculteurs et habitants de la région ont mis à jour les failles juridiques de ce projet. Leurs observations de terrain ont pu révéler que les bâtiments déjà sortis de terre excèdent la taille indiquée sur les plans fournis aux autorités et que l’un d’entre eux empiète même sur une zone archéologique censée être préservée de toute construction. M. Ramery, riche et puissant industriel du secteur du bâtiment et des travaux publics, faisant fortune souvent à partir de commandes publiques, proche de certains milieux politiques, se croyait dispensé de se conformer aux exigences du permis de construire qui lui a été accordé !
Mais il ne suffira pas de se conformer au permis de construire. Se contenter de cela de la part des pouvoirs publics constituerait un faux semblant coupable. C’est le projet lui-même qu’il faut maintenant interdire au nom de l’intérêt général, au nom de l’emploi et conformément à la loi d’avenir que propose le ministre de l’agriculture.
En effet, ce sont de graves menaces pour l’environnement, pour la sécurité sanitaire, pour la santé publique et pour l’emploi que fait peser cette « usine à lait et …à gaz ». Cette ferme-usine de 8500 m2 qui nécessite de trouver au moins 2700 hectares de terre pour l’épandage des lisiers conformément à la loi, devrait être assortie d’un méthaniseur géant pour transformer en énergie les déchets produits par ces centaines de vaches laitières et de génisses.
Il est désormais prouvé qu’une telle concentration animale a de multiples effets pervers pour la santé et l’environnement, en plus des petites fermes qu’elle détruit. Les animaux sont dopés à l’aliment concentré importé. Plus sensibles aux maladies, il faut les bourrer d’antibiotiques dont il semble qu’on en retrouve de plus en plus dans le lait et la viande de consommation. Les rejets de méthane sont très importants. A ceci il faudrait évidemment ajouter les effets négatifs induits sur les routes et les bourgs par les ballets de camion ramassant le lait.
Bien que bénéficiant de subventions dédiées à l’agriculture, le projet n’a en réalité plus rien d’agricole, puisqu’il s’agit de produire en priorité de l’énergie. Le lait et la viande n’étant plus que des « sous-produits » de qualité médiocre. Un tel système conduit à abaisser les prix à la production du lait et de la viande pour les agriculteurs –paysans. Une telle concurrence déloyale aboutira forcément à la faillite des fermes environnantes et à la perte du travail pour des dizaines de petits producteurs locaux !
Sur le plan de la santé publique aussi, ces systèmes qui ont cours en Allemagne et dans d’autres pays où ce type d’élevage est pratiqué, provoquent l’apparition de germes résistants à tous les traitements, susceptibles d’infecter les êtres humains.
En tous cas laisser faire plus avant un tel projet serait la négation de l’esprit et de la lettre du projet de loi d’avenir pour l’agriculture, l’alimentation et la forêt. Celle -ci prévoit que les politiques publiques devront favoriser l’association de «la performance économique et la performance environnementale», et propose, entre autres, un meilleur encadrement de la délivrance des antibiotiques pour les animaux aux éleveurs et de l’usage des pesticides avec comme finalité une conversion à une agriculture plus raisonné, une « agro-écologie ».
Laisser construire une telle usine en Picardie irait donc à l’encontre de ce projet. Maintenant qu’un premir recul a été imposé, de toute la France aidons nos amis de Picardie a mettre définitivement ce néfaste projet en échec.
Patrick le Hyaric
- Site de l'humanité: http://www.humanite.fr/
- Blog de Patrick Le Hyaric: http://patricklehyaric.net/
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La vache en colère
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