"L'éducation ne consiste pas à gaver mais à donner faim." Michel Tardy
L'histoire commence comme un cauchemar et finit comme un conte de fées, voilà succintement l'idée de ce film qui pourtant reflète une incroyable réalité puisque la trame de ce long métrage est issue d'une histoire vécue par un ancien élève d'un lycée de Créteil, Amhed, lycée dans lequel 26 ethnies cohabitent.
Au début de la projection, les plans successifs mis bout à bout donnent le vertige aux spectateurs effarés : des scènes de violence dès le départ et un incroyable irrespect, tragiques conséquences d'un cruel désespoir, un désintérêt railleur pour l'école dû à un manque de confiance, le tout lié à des situations familiales lourdes, des pressions religieuses et/ou communautaires... La liste serait longue... Bref, une classe de seconde dans un lycée de banlieue au niveau scolaire et social très hétérogènes, nous explose à la figure durant tout le premier quart du film. Cette piqûre de rappel sur ce qui existe hélas dans nos banlieues fait du bien à notre mémoire trop souvent déficiente. Et, face à ces élèves désabusés, une professeure toujours souriante ( Ariane Ascaride bien trop souriante à mon goût...d'ailleurs ), déterminée à sauver ces élèves du marasme pathétique qui les habite, envers et contre leur avis, contre tout et contre tous ( un Proviseur plus vrai que nature ) apparaît au spectateur un peu trop enthousisate, je pense, pour être vraiment tout à fait crédible. Elle tente de les remotiver et de leur redonner espoir à travers un projet sur "la mémoire" en les aidant habilement à participer au concours national de la Résistance et de la Déportation. A partir d'individus si cruellement différents, elle va peu à peu et avec beaucoup de patience et de respect, créer un collectif presque uni. C'est cela qui constitue le reste du film.
Ce jeune Amhed Dramé, l'initiateur donc du scénario, raconte très bien les progrès de cette lente et impensable ascension vers l'union (un peu fragile tout de même) et vers la réussite. Mais il semblerait que fort de son expérience, il ait un peu "édulcoré" le tableau, côté élèves bien-sûr (pas si facile de motiver l'in-motivable et d'unir des êtres en souffrance et diamétralement opposés...) mais surtout côtés enseignants. Ce sourire constant, presque gênant de cette professeure d'histoire paraît surréaliste et Amhed n'a certainement pas assisté aux moments de doute de sa vraie prof, résolue et endurante, certes, mais humaine cependant. Car en effet, tous ceux qui ont cotoyé le mileu enseignant, de près ou de loin, et même les autres, peuvent imaginer sans peine les incertitudes et les angoisses qui ont dû assaillir cette femme ainsi que ses moments de désespoir.
C'est peut-être ce qui fait l'éclat de ce film : l'envie de croire en l'improbable dans une ambiance chargée d'émotion ( le sujet même de la déportation en est une des causes ainsi que la présence touchante de Léon, véritable héros sauvé des camps ).
On sourit, on pleure, on a envie d'y croire, un peu comme dans la "vraie vie". Aujourd'hui, ici et maintenant, en cette sombre période pré-electorale peu porteuse d'espoir, un tel film pourrait en redonner à certains ( de l'espoir ). Si vous allez voir "les héritiers", prenez le "merveilleux" et laissez-vous aller à "l'incroyable", abandonnez-vous aux rêves de ces ados, justes et beaux, en pensant que c'est possible, comme l'union de la vraie Gauche, même si vous avez du mal à croire aux contes de fées.
Martine Taxil
(avec une tendre pensée pour notre amie et camarade Marie)
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