Fibre Excellence, Tarascon : hold-up sur les conquis sociaux et impasse du capitalisme.

27 Septembre 2020

Ce qui se passe à la papeterie Fibre Excellence de Tarascon illustre bien la rapacité des actionnaires, toujours prêts à dévorer les conquis sociaux des travailleurs, et l’incapacité des capitalistes à régler sur le fond les problèmes industriels.

Fibre Excellence une société d’importance régionale et nationale

Implantée au bord du Rhône depuis 1951, puis reconstruite en 1981, l’usine de Fibre Excellence Tarascon, produit aujourd’hui 250 000 tonnes par an de pâtes à papier à base de résineux.

La société emploie environ 270 personnes sur le site et induit environ 3 000 emplois locaux et régionaux

Le bois est approvisionné dans un rayon moyen de 250 km autour de l’usine. et 1 150 000 tonnes de bois par an sont y transformées. ⁽¹⁾

L’usine est l’unique client des exploitants forestiers, des entreprise de sciage ou de transport du bois de la région SUD. Elle est donc pour notre région un maillon clef de la filière bois

De même au niveau national, comme le souligne la CGT, « la période récente a démontré que notre activité est indispensable pour le pays : 3 mois de production intensive pendant la période du COVID à la demande de l’état) » ⁽²⁾

Un actionnaire riche et puissant

- Fibre Excellence est une filiale du groupe canadien Paper Excellence qui possède de nombreuses papeteries au Canada, où 3 400 employés travaillent pour lui, et deux en France : l'une à Tarascon et l'autre à Saint Gaudens.

- Paper Excellence est la propriété d'un richissime indonésien Eka Tjipta Widjaja dont la famille possède l'énorme conglomérat Sinar Mas Group.

-L'actionnaire ne manque donc pas de moyens

Difficultés financières et pollutions récurrentes

« L’usine perd de l’argent depuis une dizaine d’année » ⁽³⁾ Même s’il faut se méfier des manipulations comptables, qui permettent aux capitalistes de faire apparaître à leur gré pertes ici et bénéfices là, personne ne conteste le fait que l’usine a besoin d’être modernisée « Nous sommes conscients qu’une restructuration avec nombre d’axes de travaux sont à négocier pour assurer notre avenir.» écrivait le syndicat CGT du site dans un tract en octobre 2019 ⁽⁴⁾. Aujourd’hui la situation est extrêmement préoccupante et les rumeurs de cessation de paiement se font de plus en plus fortes

De même les difficultés de l’usine à respecter les normes environnementales sont bien connues. Fibre Excellence va devoir répondre aux questions de la justice. À l’issue d’une enquête préliminaire qui aura duré trois ans, le parquet local a décidé de renvoyer l’entreprise en correctionnelle pour plusieurs infractions au code de l’environnement devant le tribunal judiciaire de Tarascon ⁽⁵⁾

Sous investissement et absence d'une filière cohérente

Sous investissement:

Chez Fibre Excellence l’actionnaire, qui pourtant en a les moyens, a limité au maximum ses investissements or, comme le souligne la CGT : « les deux rapports remis par les experts (au CSE) sont clairs : pour rendre l’entreprise rentable, il faut environ 80 M€ d’investissement » ⁽⁶⁾. Ce manque d'engagement financier de l'actionnaire n'augure rien de bon pour l'avenir du site.

L’absence d’une filière industrielle :

Jean-François Guillot, vice-président de Paper Excellence, la maison mère de Fibre Excellence déclarait dans un entretien à La Provence: "Les deux (usines françaises) sont similaires et correspondent à un modèle de production parfaitement adapté à l'Europe. Les deux répondent aussi à un marché cyclique qui nécessite des outils à même de s'adapter", explique Jean-François Guillot. "Mais il y a une différence entre les deux usines, c'est leur approvisionnement. Autant Saint Gaudens est proche de sa ressource en bois constituée de résineux et de feuillus ; autant cet aspect est plus difficile pour Tarascon qui ne triture que du résineux qu'il faut aller chercher plus loin. Quand pour la première le coût de l'acheminement revient à 3 euros la tonne, il est de 10 euros pour Tarascon qui se retrouve pénalisé. Nous sommes donc en train de regarder avec l'Office National des Forêt ce qui peut être fait pour intensifier une récolte davantage régionalisée. Il faut aussi regarder les modes d'acheminement en ciblant davantage le rail et surtout le fleuve". ⁽⁷⁾

Si, bien sûr, en bon PDG, il ne manque pas de rejeter la responsabilité des difficultés de sa société sur les autres (cachez ce sous-investissement que ne je saurais voir..). ii faut pourtant l’entendre quand il dit que sans forêt et sans transports adaptés l’entreprise ne saurait être véritablement efficace.

La solution de la direction: tentative de braquage sur les conquis des travailleurs

"La direction prévoit une baisse sur la masse salariale, la réduction de nos avantages sociaux et diverses autres mesures. Depuis janvier, un plan de survie a été mis en place avec une réduction des dépenses salariales, sur les prestataires extérieurs, les achats... On nous menace de fermeture en cas de non-signature des accords", explique des syndicalistes de FO au Midi libre ⁽⁸⁾

La direction veut faire passer à la casserole les conquis sociaux des travailleurs mais on ne voit pas en quoi , ces économies de bouts de chandelles, résoudraient les problèmes de sous-investissement ou ceux de la filière bois.

« La CGT refusera donc toute mesure qui viserait à baisser les salaires ou un éventuel plan de compétitivité car ces mesures ne permettraient en aucun cas la survie de l’entreprise . » Explique ce syndicat dans un tract appelant à l’action « Tous ensemble pour nos emplois et le maintien de nos conquis sociaux

Consultés 65% du personnel ont refusé ce chantage à la fermeture ⁽¹⁰⁾

La réponse des travailleurs et l’évolution du conflit

Depuis lundi 21 septembre, la papeterie est à l'arrêt à la suite d'un mouvement social très suivi: environ 70 % des 300 salariés du site sont en grève.

« À noter que ce mouvement social a été déclenché par le comité de défense des salariés de Fibre excellence où se trouvent des sympathisants de FO, de la CGT, de la CFDT et des sans étiquettes » précise un représentant de FO qui ajoute : «FO et la CGT soutiennent les grévistes mais les élus CFDT n’ont pas voulu rejoindre le mouvement » ⁽¹⁰⁾

Et la grève tient « les délégations de la direction et des grévistes qui se sont revues ce vendredi en début d’après-midi se sont séparées sur un constat de blocage. » ⁽¹⁰⁾

La grève a été reconduite jusqu'au lundi 28 septembre.

Les communistes sont naturellement au côté des travailleurs dans le dur combat qu’ils mènent pour la défense de leur emploi et de leur conquis sociaux.

Le capitalisme impuissant

Fibre-Excellence c'est:

Une usine répondant à un réel besoin en pâte à papier comme en témoigne son maintien en activité pendant le confinement à la demande du préfet.
Un actionnaire qui devrait mettre 80 millions sur la table mais qui ne le fait pas et met toute son énergie à pressurer les travailleurs, hypothéquant ainsi emploi et environnement.
Une filière bois qui aurait besoin d’être organisée: mise en valeur et exploitation rationnelle de la forêt, amélioration du transport ferroviaire et la modernisation de la logistique fluviale

Mais c'est aussi illustration de l’incapacité du capitalisme à satisfaire les besoins de la population:

- Pris dans sa logique qui le force à rechercher les profits les plus importants et les plus rapides possibles, le capitalisme contourne, par d’incessantes restructurations ou délocalisations, ce qui lui apparaît comme des contraintes, salariales ou environnementales . Il dénie ainsi aux travailleurs le droit à une vie décente dans un cadre sûr et agréable. Le sous-investissement à l’usine de Tarascon et la volonté d’anéantir les conquis sociaux de son personnel ne s’explique pas autrement.

- La remarque de son PDG sur la nécessité d’organiser la filière montre deux choses:

pour fonctionner efficacement une usine a besoin d’un cadre organisé qui permet sa production. Dans le cas de l’usine de Tarascon , il mentionne la nécessité de développer une production forestière et de moderniser le transport tant ferroviaire que fluvial.
l’initiative privée qui, guidée par la recherche du profit à court terme, investit ponctuellement et au coup par coup est bien incapable de développer de façon cohérentes une filière et les infrastructures qu’elle nécessite. Le laisser-faire du marché est ici impuissant, seule une politique publique industrielle le pourrait.

- Quant à la démocratie et au besoin qu’a tout un chacun d’être partie prenante de son avenir, parlons-en ! Qui mieux que les travailleurs connaissent le besoin en investissement de leur outil de travail? Qui mieux que ceux qui vivent à proximité du site comprennent la nécessité de respecter ce cadre de vie qui est le leur? Qui plus légitimement que les citoyens sont à même de déterminer quelle politique publique industrielle ils veulent privilégier ? Certainement pas des actionnaires mus par la logique égoïste du profit !

C’est donc bien cette logique du profit qu’il faut mettre en cause pour lui substituer celle qui met l’humain d’abord ! C’est ce pourquoi militent les communistes. Rejoignez les!

Enver

Section Oswald Calvetti du PCF

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