Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog

Sur le site des communistes de Pierre Bénite

 

Pedro Castillo le favori
 

Pour le second tour de la présidentielle péruvienne, ce dimanche 6 juin, Pedro Castillo, candidat de gauche, affronte la représentante de la droite, Keiko Fujimori, fille de l’ex-président emprisonné pour crimes contre l’humanité et corruption, qui tente d’effrayer l’électorat en dénonçant le « communisme » de son adversaire.

Pour le second tour de la présidentielle péruvienne, dimanche 6 juin, on ne pouvait imaginer deux rivaux aux personnalités et aux parcours si différents. D'un côté, Keiko Fujimori, 46 ans, une néilbérale fille de président, et de l'autre Pedro Castillo, 51 ans, enfant d’une famille de paysans illettrés devenu maître d’école et syndicaliste.

Keiko Fujimori est candidate pour la troisième fois après deux échecs successifs en 2011 et 2016. Beaucoup de Péruviens lui tiennent rigueur de l’héritage de son père – l’ancien président putschiste Alberto Fujimori qui purge une peine de prison de 25 ans pour crimes contre l’humanité et corruption –, et de son comportement autoritaire néfaste pour la démocratie péruvienne. 

À gauche, le membre du parti de gauche Perú Libre (Pérou Libre), que les médias comparent à l’ancien président bolivien Evo Morales en raison de la similitude de parcours (origines autochtones et rurales, militantisme, syndicalisme...). Ce dernier le soutient, jugeant qu’il a « un programme semblable au nôtre : révolution démocratique et culturelle pacifique, défense des ressources naturelles et promotion d’une Assemblée constituante, au profit du peuple pour qu’il y ait une justice sociale ».

Pedro Castillo, originaire de Puna, dans les Andes, est arrivé en tête au premier tour le 11 avril (18,92 % contre 13,40 % pour Fujimori, avec 18 candidats, un record). Dans les régions andines les plus pauvres, le « Pérou profond », loin de la côte Pacifique et de la capitale Lima, il a remporté plus de la moitié des suffrages.

Il est le candidat des gens humbles et honnêtes et promet une Assemblée constituante. Son slogan : « Plus de pauvres dans un pays riche. » « Je viens avec les mains propres », a-t-il déclaré au début du débat organisé le 31 décembre à Arequipa, la deuxième ville du pays, en présentant ses paumes à la caméra. « Je suis un homme de travail, un homme de foi, un homme porteur d’espoir. Ceux qui disent que je vais vous prendre votre maison, votre propriété, sont des menteurs », a-t-il ajouté.

Keiko Fujimori, elle, s’inspire du président brésilien d’extrême droite Jair Bolsonaro, pas simplement sur le plan des idées. Elle fait campagne, revêtue du maillot blanc et rouge de l’équipe nationale de football, comme lui porte le jaune et vert du Brésil. Elle utilise aussi les mêmes anathèmes à l’égard d’un adversaire qualifié de violent, jouant aussi sur la « peur du rouge » en maniant à la fois le traumatisme de la guérilla marxiste-léniniste du Sentier lumineux des années 1980 et 1900.

Face au communiste, dit-elle, elle se présente comme la candidate de la démocratie. Un comble pour celle qui n’écarte pas de faire libérer son père de prison si elle est élue et est poursuivie par la justice dans un dossier de corruption. Elle a également passé plus d’un an en détention préventive, accusée d’avoir perçu illégalement plus de 17 millions de dollars.

Le 23 mai, l’historienne Natalia Sobrevilla a expliqué pourquoi il lui était impossible de voter pour Keiko Fujimori. Les raisons sont multiples, soulignait-elle, « mais l’une des plus importantes est de savoir de première main ce que le régime de son père était capable de faire et comment l’État sous sa direction est devenu un agent de la terreur ». « À ceux qui me disent que les péchés des pères ne sont pas les péchés des enfants, je réponds qu’il suffit de regarder l’équipe qui l’entoure aujourd’hui pour voir clairement qu’il n’y a pas de distinction nette avec les politiques des années 90. »

Alors que Fujimori, soutenue par les milieux d’affaires et de l'argent, est une partisane du néolibéralisme, Castillo plaide pour un rôle plus grand de l’État et n’exclut pas des nationalisations. L’un de ses défis sera de constituer une équipe, alors qu’il ne dispose pas de « structure partisane », soulignait Natalia Sobrevilla.

Le pays est en récession à cause de la pandémie et connaît une grande instabilité politique. S’il est élu, Pedro Castillo devra trouver une autre voie que celle empruntée par les gouvernements progressistes de la région au début du XXIe siècle. Ces derniers avaient fait le choix de fournir des matières premières aux pays les plus développés. Cela a permis le financement des programmes de redistribution et de réduction de la pauvreté, mais les grands gagnants ont été les grands groupes multinationaux.

Comme le souligne Elena Ciccozzi, chercheuse associée au CREDA (Centre de recherche et de documentation sur les Amériques), dans un article du livre collectif Gouvernements progressistes en Amérique latine (1998-2018). La fin d’un âge d’or (Presses universitaires de Rennes, 2021), « les riches sont devenus de plus en plus riches et les pauvres un peu moins pauvres ».  

Le vainqueur prendra ses fonctions le 28 juillet. Et les deux veulent être le président ou la présidente du bicentenaire, deux cents ans tout juste après la proclamation d’indépendance de 1821. 

Source Médiapart

Partager cet article
Repost0
Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :