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Photo : Basta!

Photo : Basta!

L’ambiance est dure pour les étrangers dans notre pays en ce moment. Après la chasse à l’homme lancée partout par Retailleau pour faire son quota d’expulsions – aidé en cela par des milliers d’OQTF lancées par les préfets un peu partout – l’actualité de ces dernières semaines nous a ramenés à la réalité de l’exploitation de main d’œuvre dans certaines exploitations agricoles.

 

Exploitation, le mot est lâché pour ces 50 saisonniers tunisiens employés dans des champs du côté de Pernes les Fontaines. 12 heures de travail, sept jours sur sept avec seulement trente minutes de repos chaque jour, voilà pour les conditions de travail, le tout pour 1200 euros de salaire chaque mois. Côté conditions de vie, des locaux insalubres ou on s’entasse dans des conditions d’hygiène déplorable, une surveillance permanente des mouvements et déplacements…

C’est suite à une dénonciation de ces conditions par une douzaine de ces salariés qui ont alerté en avril la gendarmerie de Pernes-les-Fontaines, qu’une enquête préliminaire est menée par le Parquet de Carpentras. L'Office central de lutte contre le travail illégal (OCLTI) a été saisi de ce dossier. C’est ICI Vaucluse (ex France Bleu) qui a révélé l’affaire.

D’autres histoires similaires ailleurs

La presse locale, puis de nombreux autres médias, se sont depuis emparés de cette histoire, qui pour être hors norme, n’en est pas moins une parmi d’autres. Comme le rappelle « La Marseillaise », fin 2023, la situation de quelque 17 saisonniers agricoles marocains, victimes d’impayés et logés dans des conditions indignes à Malemort-du-Comtat, avait fait grand bruit, débouchant sur la mise en examen des exploitants pour traite d’êtres humains, conditions de travail et d’hébergement indignes et exécution de travail dissimulé.

Trois personnes et deux sociétés étaient jugées ce 19 juin par le tribunal correctionnel de Châlons-en-Champagne, nous dit aussi « l’Humanité ». Elles sont accusées d’avoir exploité (en 2023) dans une chaîne de sous-traitance des travailleurs sans papiers, entassés dans un logement insalubre. Le procureur a requis quatre ans de prison, dont deux ferme, contre la femme à la tête d’Avanim, l'une des entreprises en cause, et trois ans, dont un ferme, contre les deux hommes accusés d’avoir recruté les vendangeurs.

Une arnaque aux papiers

Dans la plupart de ces affaires, y compris celle qui nous concerne à Pernes, s’ajoute le fait que ces travailleurs passaient par des plateformes et devaient payer des sommes astronomiques (8000 euros, soit six mois de salaire !) pour obtenir ces contrats. Dans une affaire du même type à Toulouse l’an dernier, on apprenait que les sommes ainsi versées l’étaient en promesse de l’obtention de papiers pour rester en France… Promesse qui évidemment ne peut engager que celles et ceux qui y ont cru.

Si on peut se réjouir d’apprendre que certains devraient bénéficier d'un relogement en urgence, le sort de ces travailleurs à moyen terme est plus inquiétant. Vont-ils être indemnisés, pour avoir été les victimes d’un trafic d’êtres humains, sachant que trois personnes ont été arrêtées mercredi 11 juin sous ce chef d’accusation, et que 410 000 euros ont été saisis sur des comptes bancaires ? Risquent-ils eux aussi une Obligation de Quitter le Territoire Français, après avoir été les victimes de ces esclavagistes contemporains ? Les trois personnes mises en cause ont été entendues par la justice la semaine dernière avant d’être remises en liberté, le temps que d’autres investigations soient menées.

Le droit du travail ne doit pas être une option

Combien d’autres sont en ce moment même victimes de ce type d’exploitation ? Car il ne s’agit pas de situations exceptionnelles dans les champs. Lors de la fin du confinement en 2020, on entendait parler des difficultés de paysans, qui ne trouvaient plus d’étrangers à recruter, et se plaignaient que la main d’œuvre française disponible soit si peu enthousiaste pour aller récolter leurs fraises. Mais l’auteur de ces lignes peut témoigner des conditions inacceptables trop souvent faites aux saisonniers, travail au noir, salaire a minima, ambiance tendue… Il faut être dans une situation désespérée pour accepter des telles conditions. Il faudra peut-être imposer dans les lycées agricoles une nouvelle matière : initiation au droit du travail.

C. C

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Tag(s) : #AGRICULTURE
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