Vendredi premier juillet, nous étions environs cinquante, adhérents ou invités, à participer à cette dernière réunion de section avant la trêve (toute relative) estivale.
Elle s'est ouverte par le rapport introductif de notre secrétaire, Bruce; rapport portant la marque de Rosa Luxembourg (1) et que Rouge Cerise publie ci-dessous.
Si la discussion qui a suivi a fait ressortir la diversité de nos analyses, elle a aussi montré notre unanimité pour continuer à relever, avec determination et enthousiasme, le défi des Jours heureux, lancé par la campagne de Fabien Roussel.
La section à ensuite adopté son plan de travail pour la période à venir, nous y reviendrons.
Pour terminer la soirée, nous avons ensuite partagé un moment de convivialité et de fraternité autour d'un buffet auquel chacun, mais en réalité surtout chacune (nous avons des progrès à faire), avait contribué.
C'est dans ce cadre que nous avons eu la joie de voir Yvette rejoindre notre parti. Ce qui porte à sept le nombre des adhésions à notre section en 2022 ( section de 50 membres au premier janvier).
Une belle soirée et un jalon vers les jours heureux!
Enver
(1) Fondatrice du Parti communiste d'Allemagne
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Rapport introductif à la discussion de Bruce
Cher-e-s camarades,
Vous vous en doutez peut-être, ce dernier rapport introductif avant la trêve estivale abordera la question de la longue période électorale qui vient de se clore avec l’élection d’un nouveau parlement.
Mais avant toute chose, parce qu’une citation fait toujours bonne impression, je voudrais partager avec vous ces quelques mots de Rosa Luxemburg datant de 1918 et extraits de Die Rote Fahne (Le Drapeau Rouge) :
« C’est pure folie que de s’imaginer que les capitalistes pourraient se plier de bon gré au verdict socialiste d’un parlement, d’une assemblée nationale, qu’ils renonceraient tranquillement à la propriété, au profit, aux privilèges de l’exploitation. Toutes les classes dominantes ont lutté jusqu’au bout pour leurs privilèges avec l’énergie la plus tenace...»
En 2020 ont eu lieu les élections municipales, suivies de près, en 2021, par les élections départementales, couplées, dans un souci de lisibilité sans doute, aux élections régionales. Ces trois échéances, largement perturbées par la crise sanitaire, étaient plus ou moins les prémisses de celles à venir en 2022.
Désintérêt, incompréhension par la population des enjeux, abstention massive des électeurs, tentatives de rassemblement des forces de gauche plus ou moins réussies sur le principe, mais sans aucun résultat tangible dans les faits.
Nationalement le Parti communiste perd le dernier Conseil général qu’il dirigeait, mais reste présent dans de nombreuses mairies et collectivité locales.
Le score de nos 4 camarades sur le canton de Pernes a démontré qu’il était tout à fait possible d’afficher ses convictions, de se réclamer du monde du travail, de s’afficher rouges et communistes et d’obtenir un score plus qu’honorable. Score allant jusqu’à inquiéter le notable « de gauche» local, qui n’osait même plus se réclamer du Parti socialiste dont il était pourtant le candidat. Ses affiches, d’un bleu profond en début de campagne, ont légèrement rosi vers la fin…. .
En 2022, pour la première fois depuis 2007, un communiste était candidat à l’élection présidentielle. La décision du 38e congrès de présenter un candidat à cette élection répondait à une exigence historique : sans candidat, le PCF, déjà fortement affaibli, disparaissait de la vie politique française. Jean Luc Mélenchon avait valorisé le PCF en 2012, l’avait utilisé en 2017 et l’aurait sans aucun doute effacé en 2022.
Le vote Roussel au premier tour est certes faible, beaucoup plus faible que ce que la campagne montrait comme possible et beaucoup plus faible que les espoirs des militants. Mais le fait est que le PCF a existé dans cette campagne avec un discours communiste qui ne se confondait pas avec un discours "de gauche". Le PCF est redevenu visible pour les citoyens.
Cette bataille difficile, dans laquelle nous avons subi les pires attaques, venant souvent de ceux qui se prétendaient « de notre camp », cette bataille où on nous a reproché de diviser la gauche, s’est traduite par deux résultats positifs : une large unité des communistes, très heureux de cette campagne et fiers de leur candidat, et une forte visibilité médiatique, dont l’absence pendant des années nous a coûté si cher.
Le PCF, bien avant le premier tour et tout au long de la campagne des présidentielles, conscient des divergences à gauche, mais tendu vers l’objectif de mettre en échec la réédition de 5 années de destruction des conquis sociaux de la Libération, n ‘a cessé de proposer un pacte d’engagement législatif commun afin que la gauche puisse d’aller aux élections législatives unie sur 10 ou 15 projets législatifs.
Il y avait, et il y a encore sans doute toujours chez certains, l’idée qu’une partie de la population, acquise aux idées de gauche, aspire à l’unité, condition sine qua non pour combattre efficacement dans les urnes les politiques de Macron et rompre avec la poursuite de la politique favorable au capital.
En réalité cette "exigence populaire" reste difficilement quantifiable, elle ne sert bien souvent que les stratégies politiciennes en personnifiant à l’excès les candidatures et en excluant tout débat d’idées. Depuis quand les communistes devraient-ils se contenter de suivre les idées dominantes ?
Après son troisième échec à la présidentielle, il fallait à Mélenchon et à ses militants des coupables, ils étaient tout trouvés: Fabien Roussel en premier lieu puis, plus généralement, les autres partis de gauche. …..
Les accords électoraux en vue des législatives que Fabien Roussel appelait de ses vœux redevenaient d’actualité, mais à condition que cela soit sous l’égide de l’Union Populaire. La campagne législative s’est réduite alors à une campagne nationale, les candidats locaux n’ayant pas de communication spécifique, tout venant d’en haut, sous le pilotage d’une équipe réduite autour du "grand homme".
Difficile dans ces conditions de mener une campagne telle que nous le souhaitions dans la troisième circonscription de Vaucluse où se présentaient nos camarades Muriel et Olivier. Leur score tout à fait correct (presque 20 %) dans cette circonscription largement acquise à l’extrême droite est-il à mettre au compte de la NUPES ?
Sur ce point je me garderais de prendre position même si la première place avec 70 voix sur 174 au Beaucet, village martyr de la Résistance, la deuxième position devant le député sortant à Sorgue et à Entraigues ( villes industrielles et populaires ), le score de 20,88 % à Pernes me suggère une réponse.
Les résultats des législatives nous permettent maintenant de constater que cet accord autour de la NUPES n’a aucunement permis le recul de l’abstention ou celui de l’extrême droite. Pour tous ceux qui espéraient un tournant à gauche après un mandat Macron au service des riches et pour tous ceux qui misaient sur le rejet que suscite Emmanuel Macron, le constat est brutal….
Il y a bien eu un vote de rejet en effet mais il s’est exprimé autant par le vote en faveur du RN qu’en faveur de la NUPES. L’analyse géographique et sociologique confirme même que le monde ouvrier s’est massivement détourné de cette "exigence populaire de l’union de la gauche", en tout cas de sa représentation par l’Union Populaire.
La multiplication par 10 du nombre de députés RN est bien entendu à mettre au bilan de l'action antisociale menée par les gouvernements successifs, que ce soit sous les présidences de Macron, d’Hollande, de Sarkozy, de Chirac ou Mitterrand. Elles ont conduit à l'abstention massive des classes populaires, démobilisées par les les trahisons de ces 40 dernières années et choquées par la violence, la morgue et le mépris de Macron envers ceux "qui ne sont rien ». Ce ne sont pas les timides appels de circonstances, " pas une voix pour le RN ", qui pouvaient motiver à voter pour un candidat macroniste en cas de duel avec le RN.
Cerise sur le gâteau, les amalgames puants de la majorité présidentielle, qui assimilaient la gauche progressiste à l’ extrême droite, ont participé à cette dédiabolisation du RN. À moins qu’ils ne soient seulement révélateurs de l’effondrement du barrage républicain et de la banalisation des idées prônées par le RN. On sait d’expérience que la droite libérale préfère Hitler au Front Populaire.
Le résultat est là : 89 députés RN, un record historique, les 3/4 de l’Assemblée à droite ou à l’extrême droite. Dans notre département de Vaucluse ce sont 4 circonscriptions sur 5 qui sont aux mains du RN. Mais la réalité des chiffres c’est surtout que nationalement il y a 13 millions de personnes non-inscrites sur les listes électorales (6 millions de plus qu’en 2012), et 12,5 millions d’abstentions (2 millions de plus qu’en 2017).
Pour le Parti communiste, l‘objectif d’un groupe communiste est atteint. C’est un atout important pour notre visibilité et l’activité du PCF, c’est un point d’appui utile pour les luttes émancipatrices. Cependant, l’obtention du groupe s’est faite sous la contrainte de la France insoumise et de son leader Jean-Luc Mélenchon. Elle se paie au prix fort de plus de 500 circonscriptions interdites de candidats communistes, malgré l’encrage local de notre parti et des enjeux régionaux importants pour aujourd’hui et pour l’avenir.
L’union populaire ne se décrète pas, elle ne peut que se construire à la base. Soyons attentifs aux luttes sociales actuelles (pour l’augmentation des salaires, pour la reconquête d’un service public de l’énergie, de l’hôpital, de l’éducation ...) elles montrent que des convergences peuvent être trouvées dès maintenant.
Le Parti communiste est un outil au service de l’émancipation, comme tout outil il a besoin d’être entretenu. Un outil ne devient obsolète que s’il en apparaît un autre plus novateur, plus efficace.
Depuis 2017, Jean-Luc Mélenchon dirige un mouvement sans élections internes, sans organisations départementales et sans responsables locaux. Quelques personnalités nationales existent à côté de lui, mais ce sont ses seuls messages qui sont relayés partout et repris dans de multiples réseaux.
Jusqu’à preuve du contraire les communistes et leur parti ont toujours un rôle décisif à jouer, à condition qu’ils choisissent de tenir un langage constant de vérité, au plus près des citoyens et en premier lieu du monde du travail, de faire le pari de l’éducation populaire, de l’engagement de terrain, même et surtout si le rapport de forces est défavorable.
Son programme de rupture doit clairement dire COMMENT il va prendre la main sur le système économique et financier et comment il peut surmonter le refus de la bourgeoisie de voir remis en cause ses privilèges (par les nationalisations, par la garantie de droits supplémentaires aux travailleurs, par la remise en cause des traités européens, etc).
C’est à nous de faire vivre notre parti. S’il ne développe pas avec ses militants la capacité de résister aux idées dominantes ou s’il s’efface derrière un nouveau parti socialiste alors il jettera à la poubelle les acquis de la campagne présidentielle qui sont pourtant sa première marche pour reconstruire un parti de rupture et véritablement émancipateur.
Et c’est bien ce qu’écrivait Rosa Luxemburg à la suite des quelques lignes citées en préambule :
« À la violence de la contre-révolution bourgeoise, il faut opposer le pouvoir révolutionnaire du prolétariat, aux attentats, aux intrigues ourdies par la bourgeoisie, la lucidité inébranlable, la vigilance et l’activité jamais en défaut de la masse prolétarienne ».