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L' Humanité, Mercredi 31 Octobre, 2018

Le budget la Sécurité sociale pour 2019 a été adopté hier par 335 voix contre 190 à l’Assemblée nationale. Il organise une baisse drastique des recettes qui sera répercutée sur la qualité des prestations.

Il y a d’un côté les beaux discours. La semaine dernière, la ministre de la Santé, Agnès Buzyn, a assuré que le budget de la Sécurité sociale pour 2019 portait l’ambition de « bâtir un État providence fidèle aux valeurs qui ont présidé à sa création ». Et puis, il y a les faits. Hier, l’Assemblée nationale a adopté un texte qui fait un pas de plus vers l’explosion de notre modèle social. Si le rapporteur du texte, Olivier Véran (LaREM), a vanté un budget « en équilibre pour la première fois depuis dix-huit ans », la méthode adoptée va durement impacter le quotidien des Français. « Votre budget est celui d’un nouveau tour de vis. C’est 5,7 milliards d’économies que devra réaliser la Sécurité sociale en 2019, dont 3,8 milliards sur les seules dépenses d’assurance-maladie », a dénoncé le député PCF Pierre Dharréville. Pas moins de 910 millions d’euros seront réclamés à une sphère hospitalière déjà exsangue. L’Objectif national des dépenses d’assurance-maladie (Ondam) n’augmentera que de 2,5 %, alors même que les dépenses de santé connaissent une hausse tendancielle d’environ 4,5 % chaque année.

Un 100 % santé réservé à ceux qui prendront des complémentaires

Affichant sans rire son « sérieux budgétaire », la majorité pousse en réalité comme jamais une stratégie d’assèchement des ressources de la Sécu, déjà à l’œuvre depuis des années. Elle n’hésite pas, au passage, à faire payer la note aux services publics et aux contribuables. Le cumul de toutes les exonérations fiscales votées pourrait atteindre 71 milliards d’euros de pertes en 2019, transformation du Cice, allègements sur les bas salaires et désocialisation des heures supplémentaires inclus. La Macronie continue en outre son tour de passe-passe en piquant du salaire brut aux Français, sans rendre l’équivalent en net, tout en augmentant la CSG pour retomber sur ses pieds. En outre, 800 millions d’euros seront prélevés sur le dos des familles.

Ému, le député FI François Ruffin s’est indigné de cette « gabegie » organisée, au nom de laquelle « c’est le peuple que l’on saigne » ! Les élus de la majorité se sont défendus avec leur projet de « reste à charge zéro » pour les soins dentaires, optiques et auditifs. Sauf que « ce 100 % santé sera réservé aux gens qui prendront des complémentaires », a pointé Ericka Bareigts (PS). Quatre millions de personnes n’en ont pas aujourd’hui. Et les mutuelles pourront très bien augmenter leurs tarifs globaux pour compenser leur participation à ce dispositif. Idem pour la mise en place d’une couverture maladie universelle (CMU) élargie, qui vise à intégrer 200 000 personnes de plus. Soit bien peu, alors qu’une personne sur quatre renonce actuellement à se soigner pour des raisons financières.

Il y avait bien d’autres pistes pour renouer avec « l’État providence » et assurer une « Sécurité sociale du XXIe siècle ». Mais nombre d’amendements allant dans ce sens ont été repoussés. Tel a été le cas quand les communistes ont voulu s’attaquer plus fortement à la fraude patronale aux cotisations sociales. Son montant est estimé à 25 milliards d’euros par an par la Cour des comptes. Seulement 1,5 milliard d’euros sont récupérés par l’Urssaf, dont 555 millions au titre du travail dissimulé… au sujet duquel les sanctions ont été allégées par la majorité. La régulation de l’installation des médecins libéraux dans les zones excédentaires pour lutter contre les déserts médicaux a aussi fait long feu. Tout comme les mesures défendues par les élus PCF et FI pour faire baisser les prix des médicaments, notamment quand ils sont issus de la recherche publique ou quand l’intérêt de la santé publique le justifie.

Aurélien Soucheyre

Tag(s) : #A LA UNE AUJOURD'HUI
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