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Des Soudanais dans le camp de Calais (cabane détruite à ce jour) © Paul Béjannin

 

Texte publié le 10 mars 2016 Par Paul Béjannin https://blogs.mediapart.fr/paul-bejannin

Suite à une discussion avec des amis hier, j’ai réalisé que peu de personnes avaient vraiment compris ce qui se déroule aujourd’hui à Calais et Grande-Synthe. J’ai donc essayé de résumer tout cela afin de fournir des éléments factuels d'information à ceux qui en cherchent.

 

D’un côté, à Grande-Synthe (banlieue de Dunkerque), un camp construit et financé au trois-quarts par MSF (Médecins Sans Frontières) aux normes internationales du Haut Commissariat des Nations Unies pour les Réfugiés (HCR) avec cabanes en bois chauffées et isolées pour 5 personnes, des douches chaudes, des coins cuisine, des toilettes et des coins de vie. Ce camp est venu répondre à l’arrivée de plus de 3000 réfugiés dans une zone inondable (cf. photographie ci-contre) de cette petite ville de la banlieue de Dunkerque entre Septembre 2015 et Janvier 2016. Il a ouvert lundi 7 Mars 2016.

De l’autre, à Calais, un camp réalisé entièrement avec l’argent des donateurs et les mains des bénévoles et des réfugiés, qui permettait à des milliers de personnes de ne pas dormir dehors en attendant que l’Etat se réveille et agisse comme il le doit, en fournissant un accueil humain à ces personnes et en régularisant leur situation lorsque c'est leur droit.

Hier, en discutant avec des amis, j’ai compris une chose. Les personnes qui ne s’informent que par la télévision, n’ont pas du tout conscience de ce qui se déroule dans le Nord de la France.

En effet, deux d’entre eux m’ont dit avoir compris que « la partie Sud du camp, insalubre, a été rasée pour reloger les réfugiés dans le Nord qui est un camp aux normes HCR ». Vu de Paris, la désinformation d’Etat aidant, voici le message qui est passé. L’Etat fait son devoir en démantelant un bidonville insalubre pour reloger ces personnes dans un nouveau camp aux normes HCR.

C’est pourtant tout à fait l’inverse.

Au printemps 2015, suite au démantèlement de plusieurs camps dans Calais, la maire Natacha Bouchart décide de rassembler tous les réfugiés à un seul endroit, en périphérie de la ville, à 7 kilomètres du centre-ville, sur le terrain de l’actuel bidonville. Depuis, l’Etat n’ayant pas souhaité reconnaître l’existence de ce camp et prendre en charge l’accueil de ses occupants, ce sont les associations qui ont pris le relais. En quelques mois, elles ont réussi à construire suffisamment de cabanes en bois pour tous les réfugiés et en Février 2016, on estimait à 4% le nombre de personnes qui dormaient encore dans des tentes.

Autour de ces cabanes, de nombreux lieux de vie ont vu le jour, transformant peu à peu ce bidonville en un lieu vivant où cohabitent une dizaine de nationalités différentes et plusieurs religions. Une ville entièrement basée sur la solidarité et l’entraide est née de l’abandon de l’Etat.

Il n’y a jamais eu de zones Sud et Nord, la préfecture les a créées.

Voilà ce que le gouvernement détruit en ce moment : des cabanes en bois, des restaurants dans lesquels des réfugiés résignés à rester en France ont investi leur argent, une église, une mosquée… Et pour proposer quoi ? Personne ne sait vraiment.

Une partie des réfugiés partiront peut-être pour le nouveau camp de Grande-Synthe par leurs propres moyens (32 kilomètres à parcourir à pied avec leurs affaires, soit à peu près 6h30 de marche pour des adultes en bonne forme physique). Mais ce camp a une capacité d’accueil de 2500 personnes et la zone Sud du camp de Calais compte à elle seule 3500 personnes. De plus le nouveau camp doit d’abord accueillir les réfugiés de Grande-Synthe (à peu près 1500 personnes).

De Calais à Grande-Synthe © Google Maps De Calais à Grande-Synthe © Google Maps

Selon le compte-rendu d’audience au tribunal administratif en Février dernier, les propositions de relogement de l’Etat sont les suivantes : 300 places dans les containers installés par l’Etat à Calais, 400 places en Centres d’Accueil et d’Orientation (CAO) dans toute la France dont une partie fermera fin Mars, et 400 places dans les tentes bleues installées dans le camp par l’Etat et qui sont aujourd’hui quasi intégralement inondées.

Pour résumer : entre 700 et 1100 places sont proposées par l’Etat et le nouveau camp de Grande-Synthe pourra accueillir jusqu’à 1000 réfugiés de Calais. Il reste donc plus de 1500 personnes sans-abris suite au démantèlement de la zone Sud. Parmi elles, on estime qu’il y a entre 300 et 400 Mineurs Isolés Etrangers (MIE), c'est à dire des enfants qui se trouvent aujourd'hui séparés de leur famille. Certains d’entre eux disparaissent régulièrement du camp, pour tenter de passer en Angleterre mais aussi victimes des nombreux truands qui prospèrent sur cette zone de non-droit, et s'adonnent entre autres au trafic d'êtres humains...

Voici donc la réalité de la situation : en plein hiver, l’Etat détruit et incendie (les grenades lacrymogènes de la police ont mis le feu à plusieurs reprises) les cabanes de ces réfugiés qu’il n’avait déjà pas voulu accueillir dans des conditions humaines, et ce sans assurer de solution d'hébergement pour 1500 d’entre eux. Suite à cela, on sait déjà que la zone Nord (2000 personnes) devrait être à son tour détruite très prochainement puisque la volonté de la préfète et de l’Etat est clairement de raser tout le camp.

Enfin, et pour réellement comprendre la situation, il faut savoir que l’Etat, qui avait refusé de participer financièrement à la construction du nouveau camp à Grande-Synthe, a mis en demeure le 8 Mars 2016 le maire de cette ville de respecter les normes de sécurité dans le nouveau camp de migrants !

L’Etat refuse donc non seulement de mettre en place un accueil des réfugiés de guerre dans des conditions respectant les Droits de l’Homme les plus élémentaires, n'a pas dépensé un seul euro pour la construction par MSF du camp de Grand Synthe, mais en plus met des bâtons dans les roues de ceux qui essayent coûte que coûte de sauver l'honneur de notre pays en tentant d'appliquer avec leurs propres moyens le 14ème article de la Déclaration Universelle des Droits de l'Homme, selon lequel "Devant la persécution, toute personne a le droit de chercher asile et de bénéficier de l'asile en d'autres pays"...

 

Le nouveau camp de Grande-Synthe construit par MSF © Paul Béjannin

 

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Pour Défendre la Poste de Gadagne:

La municipalité et le collectif invitent les Castelnovin(e)s aller en délégation à Avignon remettre la motion votée en réunion publique.

Départ 9H30 Châteauneuf de Gadagne

ou RDV poste centrale d'Avignon 10H30

 

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L'Association des Amis d'Antoine Diouf et d'Albin Durand vous invite aujourd'hui

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Tag(s) : #MONDE, #SOCIETE
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